Peinture des œufs à la cire : le Kosovo perpétue la tradition

C’est un art traditionnel qui embellit la fête de Pâques. La décoration des œufs est une passion partagée par le monde slave. À chaque pays ses traditions. En Serbie, si le rituel reste immuable, les techniques ont quant à elles bien changées. Les œufs décorés à la main se font de plus en plus rares. Ils sont remplacés par les autocollants, stickers et autres patchs. Mais au Kosovo, deux enclaves perpétuent la tradition des œufs peints à la cire.

Solidarité Kosovo vous emmène dans l’une d’entre elles, à Orahovac, à la rencontre des gardiennes de ce savoir-faire ancestral.

Une tradition bien vivante

Les jeudis précédents Pâques, il règne une atmosphère de joyeuse effervescence à Orahovac. Dans cette enclave située en Métochie où vivent environ trois cents foyers serbes,  les maitresses de maison se réveillent à l’aube. Elles ont jusqu’au soir pour s’adonner à une activité qui a fait la réputation du village,   la peinture des œufs de Pâques à la cire. 

« Il s’agit d’un héritage que nous ne sommes pas prêtes d’abandonner », assure Velinka Radovanović dont les motifs peints sont aussi fins que de la dentelle.  Cette technique de décoration qui utilise de la cire naturelle d’abeille est à la fois la plus classique et la plus compliquée.  « C’est une méthode traditionnelle qui a été transmise de génération en génération. Personnellement, je l’ai apprise avec ma grand-mère» poursuit Velinka. « L’équipement est simple : il nous faut une craie de cire que nous faisons fondre dans une cuillère installée au-dessus d’un réchaud à alcool ou d’une bougie. Autre outil : un crayon dans lequel nous enfonçons une épingle que nous trempons dans la cire et à l’aide de laquelle nous pouvons dessiner. »

Tout un art

La plupart des motifs peints sont inspirés des vêtements traditionnels serbes ce qui explique certains motifs complexes. Les couleurs utilisées obéissent à des règles strictes. Selon la tradition, les œufs ne peuvent jamais être de couleur bleu clair car c’est une couleur de deuil. A côté des œufs jaunes (symbole du soleil), verts (symbole du bonheur) et noir (symbole de la terre), les œufs sont traditionnellement peints en rouge, couleur qui symbolise le sang du Christ, sa Résurrection, et la vie. Les couleurs sont de préférence extraites de colorants naturels, comme la pelure des oignons, la betterave rouge ou les noix.

Indissociables : « Pas d’œuf pas de Pâques »

Autrefois, les œufs peints étaient le seul cadeau offert à Pâques. Aujourd’hui, ils accompagnent toujours les familles à l’église, nichés dans une jolie petite corbeille en osier, pour être bénis au terme de la liturgie pascale de quatre heures. A leur retour au foyer, certains œufs sont mangés à l’issue d’un jeu cocasse, le « duel d’œufs ». Lors du repas pascal, chaque membre de la famille choisit un œuf décoré puis,  tour à tour, chacun à table essaie de casser l’œuf de son voisin avec trois doigts. Celui qui parvient à garder la coquille de son œuf intact est le gagnant du duel. L’œuf vainqueur est aussi considéré comme signe de chance pour son détenteur. Enfin, d’autres œufs sont uniquement destinés à décorer la table et la maison.

Un devoir

« Ce que j’aime avec cette tradition c’est qu’elle nous unit. Comme un fil, elle nous lie aux générations passées par la répétition de leurs gestes. Elle nous lie aussi à notre famille et communauté en nous rassemblant aujourd’hui autour de ces œufs», reprend Olivera Radic, professeur de serbe. «  Tant que mes mains me le permettent, je vais continuer de peindre les œufs de Pâques à la cire.  C’est un devoir que j’ai hérité de ma mère, un devoir que je transmets à ma fille. »

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